Royaume-Uni: Le gouvernement, la police et les médias de droite lancent une chasse aux sorcières contre les manifestants qui dénoncent le génocide israélien

La Police métropolitaine, soutenue par le gouvernement conservateur et les médias de droite, a transformé son offensive contre les manifestations réclamant un cessez-le-feu à Gaza en une chasse aux sorcières maccartiste qui vise des manifestants en particulier.

Les médias ont diffusé des images de deux personnes portant des pancartes. Ils étaient présents lors de la grande manifestation de samedi à Londres, qui a rassemblé 800.000 personnes.

Capture d’écran du site web du Times montrant deux manifestantes avec des pancartes dans le cadre de la chasse aux sorcières menée par les médias [Photo: screenshot: The Times web site]

L’une d’entre elles, assimilant les actions du gouvernement israélien à celles des nazis, montrait l’étoile de David entrelacée avec une croix gammée et les mots suivants: «Aucun homme politique britannique ne devrait être un “ami d’Israël”».

L’autre pancarte artisanale représentait le Premier ministre Rishi Sunak et l’ex-ministre de l’Intérieur Suella Braverman sous forme de noix de coco. Cette référence au fait qu’ils sont «blancs à l’intérieur» est considérée comme un «crime haineux» passible de poursuites contre les deux bellicistes qui ont tenté d’interdire la manifestation.

Les deux manifestantes font partie des six personnes identifiées par leurs photos par la police métropolitaine avec la menace suivante: «Nous enquêtons sur la personne figurant sur cette photo en relation avec un crime haineux qui a eu lieu aujourd’hui».

Le message publié sur X/Twitter invitait «toute personne pouvant nous aider à les identifier» à contacter la police. Les fils de discussion concernant les deux personnes tenant les pancartes ont été consultés respectivement plus de 14 millions et 16 millions de fois.

Par ailleurs, la police serait à la recherche de deux hommes qui ont escaladé l’hôtel de ville de Sheffield et arraché un drapeau israélien lors d’un rassemblement pro-palestinien, également pour un prétendu «crime haineux».

Les bannières ciblées par la police de Londres n’ont rien à voir avec la «haine» ou une quelconque activité criminelle. Les deux femmes qui les brandissaient, déjà identifiées par les médias comme étant Marieha Mohsin Hussain et Kate Varnfield, doivent être et seront résolument défendues.

En fait, une grande majorité de ceux qui ont défilé à Londres et dans d’autres villes ainsi que des millions de personnes dans le monde seraient tout à fait d’accord pour comparer les actions du régime de Netanyahou à celles des nazis. Le gouvernement israélien procède à la destruction et à l’expulsion du peuple palestinien à Gaza, tuant des milliers de personnes chaque semaine.

Fin octobre, alors que l’assaut israélien sur Gaza s’intensifiait, Craig Mokhiber a démissionné de son poste de directeur du bureau de New York du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, déclarant : «Il s’agit d’un cas d’école de génocide».

Le projet colonial européen, ethnonationaliste, de colonisation en Palestine est entré dans sa phase finale, vers la destruction accélérée des derniers vestiges de la vie palestinienne autochtone en Palestine. Qui plus est, les gouvernements des États-Unis, du Royaume-Uni et d’une grande partie de l’Europe sont totalement complices de cet horrible assaut», a déclaré Craig Mokhiber.

La semaine qui a précédé la manifestation de samedi dernier a été dominée par l’attaque de Braverman contre la police métropolitaine, qui n’a pas interdit ce qu’elle a qualifié de «marches de la haine». Le commissaire Mark Rowley a clairement indiqué qu’il ne pouvait pas le faire en vertu de la législation existante, mais qu’il s’engageait néanmoins à augmenter considérablement le nombre d’arrestations de manifestants.

Quelques heures après la fin de la manifestation, un communiqué de la police métropolitaine indiquait: «Nous enquêtons activement sur un certain nombre d’infractions graves liées à des crimes de haine et à un éventuel soutien à des organisations interdites pendant la manifestation», ajoutant: «Nous publierons bientôt des images de certaines des personnes que nous soupçonnons d’avoir commis ces infractions et, comme nous l’avons montré ces dernières semaines, nous poursuivrons toutes les pistes d’enquête disponibles afin d’identifier les suspects et de prendre des mesures même après la fin des manifestations».

La police métropolitaine a reçu le soutien de Sunak qui a déclaré : «La peur et l’intimidation dont la communauté juive a fait l’objet au cours du week-end sont déplorables. Tout acte criminel doit être sanctionné par la force totale et rapide de la loi.»

En réalité, la déclaration de Braverman a donné le feu vert à quelques centaines de fascistes pour tenter de manifester au monument aux morts du Cénotaphe le jour de l’Armistice et d’attaquer ensuite des sections de la manifestation.

Quatre jours avant les événements, Braverman avait écrit dans le Times que les supporters de football avaient souffert de manière disproportionnée aux mains de la police; la majorité des voyous d’extrême droite qui ont attaqué la police étaient membres de «firmes» de football de gangs. Des images prises par des manifestants antiguerre à la gare de Waterloo montrent un groupe de voyous d’extrême droite, dont l’un porte le maillot du club de football d’Arsenal, qui les menacent et les bousculent. L’un des meneurs, identifié en ligne quelques heures plus tard sous le nom de Kevin Sweeney, est un supporter du Chelsea Football Club. Sur la vidéo, on le voit s’approcher à plusieurs reprises du manifestant antiguerre qui filme l’agression et lui dire – à quelques centimètres de son visage – qu’il est un «connard terroriste».

Trois des quatre personnes ont été arrêtées par la police des transports britannique à la suite d’une «altercation aggravée par des considérations raciales».

Non seulement des manifestants pacifiques s’opposant au génocide sont comparés à de tels voyous, mais les gros titres diabolisant les manifestants antiguerre sont utilisés pour minimiser le fait que la grande majorité des plus de 140 arrestations effectuées par la police au cours du week-end étaient le fait de la racaille fasciste.

Le Times, dans son article en ligne intitulé «Un enseignant recherché par la police pour une caricature de noix de coco lors d’une manifestation propalestinienne», a ajouté 89 mots sur les événements survenus à la gare de Waterloo, comme une réflexion après coup.

La principale plainte de la police métropolitaine samedi était que l’encouragement de l’extrême droite par Braverman avait empêché la police de cibler les manifestants antiguerre. Le commissaire adjoint, Matt Twist, a écrit samedi soir: «Localiser et intercepter des suspects dans une foule de la taille de celle que nous avons vue aujourd’hui sera toujours un défi, mais nous avons été encore plus limités dans notre capacité à le faire en raison du nombre de policiers que nous avons dû déployer, dès le début de la journée, en réponse à la violence des groupes de droite dans le centre de Londres».

Cette chasse aux sorcières confirme la dérive du gouvernement et de l’État vers la droite depuis la démission de Braverman.

Après avoir limogé Braverman pour avoir contesté son autorité et critiqué la police, Sunak a fait savoir que cela ne signifiait pas un désaccord avec la nécessité de réprimer l’opposition populaire. Lundi, le tabloïd The Sun a fait partie des journaux qui ont rapporté les plans de répression des manifestations qui leur ont été envoyés par le bureau de Sunak.

Le seuil à partir duquel les policiers peuvent interdire les marches et les manifestations pour des raisons de sécurité serait abaissé. La loi sur la glorification des terroristes comme le Hamas serait également renforcée, les policiers estimant qu’elle est trop vague pour être appliquée à l’heure actuelle. En outre, «les ministres étudient également les moyens de restreindre certains slogans, comme “de la rivière à la mer”, lors des manifestations, en travaillant avec les organisateurs pour fixer les conditions d’approbation des manifestations».

Le journal ajoute, comme justification supposée de ces mesures répressives, que «le resserrement envisagé par Downing Street intervient après une journée de haine dans le centre de Londres et des semaines de manifestations propalestiniennes qui ont été marquées par des affiches et des slogans antisémites».

(Article paru en anglais le 15 novembre 2023)

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