Samedi, alors que des millions de personnes manifestaient à travers le monde contre le génocide à Gaza, avec 800.000 personnes mobilisées à Londres, des manifestations propalestiniennes se sont déroulées à travers le France. Des milliers de personnes se sont mobilisées à Lyon, Marseille, Toulouse, Nantes, Lille et dans d’autres grandes villes. Des dizaines de milliers ont manifesté à Paris.
Ce mouvement mondial, qui mobilise des millions de travailleurs et de jeunes de villes allant de Djakarta en Indonésie à Washington, combat le soutien à Israël de tous les gouvernements capitalistes, et surtout des gouvernements impérialistes de l’OTAN. Alors que des appels circulent à des grèves à travers l’Europe pour stopper le ravitaillement militaire d’Israël, ces mobilisations expriment d’un conflit de plus en plus ouvertement antifasciste et anticapitaliste de la classe ouvrière internationale contre les élites dirigeantes.
Les manifestants interviewés par le WSWS à Paris samedi et la semaine précédente ont dénoncé le soutien de Macron à Israël, et affirmé leur soutien aux luttes ouvrières contre le génocide à Gaza.
Ahmed Berrahal, travailleur des transports, a dit: «On demande un cessez-le-feu. Gaza est bombardé ... jour et nuit. C’est un génocide. On a un gouvernement qui fait croire qu’il appelle à un cessez-le-feu, mais il dit ensuite à Israël ‘vous pouvez vous défendre.’ Mais 10.000 morts en un mois et la plupart sont des femmes et des enfants, ce n’est pas une guerre, ça. On veut exterminer tous les Palestiniens et les Gazaouis, tout simplement.»
Il a dénoncé les sanglantes guerres des pays de l’OTAN au Moyen Orient depuis la dissolution stalinienne de l’URSS et la guerre du Golfe contre l’Irak en 1991. Il a pointé du doigt l’hypocrisie de la France qui a attaqué la Libye en 2011 prétendument pour sauver son peuple, mais qui croise les bras alors qu’Israël massacre les civils sans défense à Gaza.
Il a dit, «Quand (le dirigeant libyen Mouammar) Kadhafi a dit qu’il allait attaquer son peuple, la France bizarrement est partie en Libye et elle a défoncé le pays. On a défoncé l’Irak, on a défoncé la Syrie. Mais aujourd’hui, quand Gaza se fait attaquer jour et nuit, tous les Européens regardent et ne parlent pas. … La France a les mains bien rouges de sang aujourd’hui!»
«Si on a le malheur de dire qu’il faut aider les Palestiniens, on nous traite de terroristes», a-t-il poursuivi. «Aujourd’hui on voit que les terroristes, c’est Israël. C’est eux qui bombardent jour et nuit, c’est eux qui bombardent même des hôpitaux. … On leur a coupé (aux Palestiniens) l’éléctricité, l’eau, ils meurent de faim, de froid. Pour moi c’est un génocide, mais pour le gouvernement français ce n’est pas un génocide.»
Ahmed a dénoncé le voyage de Macron à Israël pour applaudir le premier ministre Benyamin Nétanyahou: «Si Netanyahou est son pote, on peut dire que lui c’est un terroriste aussi. Il valide qu’on puisse tuer des enfants jour et nuit, alors à mon avis ils sont tous de la même clique.»
Ahmed a relié le soutien de Macron à Israël à sa violente répression des grèves de masse contre sa réforme des retraites, qu’il a imposée malgré le rejet écrasant des Français. Il a dit, «J’ai fait le mouvement sur les retraites, j’ai fait deux mois de grève et j’ai vu ce qui s’est passé. Il nous a matraqués, il y en a qui ont été envoyés au tribunal. Ce gouvernement est tordu.»
Interrogé par le WSWS sur les appels internationaux à des luttes et des grèves afin de bloquer le ravitaillement militaire d’Israël, Ahmed a dit: «Aucune arme ne doit circuler en Israël. Israël est déjà surarmé contre des gens qui se battent avec des pierres. … Israël, c’est le camp des gens qui colonisent les pays, qui butent des gens jour en nuit. Bien sûr les travailleurs sont du côté de Gaza, c’est normal.»
Manon, une jeune étudiante, a dit: «Il y a peu de manières que je peux aider à arrêter le massacre des Palestiniens, et venir ici c’est une des manières de montrer que c’est absolument affreux, c’est un crime contre l’humanité. La moitié de la population à Gaza sont des enfants ou des mineurs, et le fait qu’on les massacre avec des bombes, ça n’a pas de sens humain. Si un peuple peut faire ça dans une totale impunité, c’est quelque chose de monstrueux.»
Manon a aussi dénoncé les menaces de Macron d’interdire les manifestations propalestiniennes: «C’est contre la liberté de pensée et d’opinion, ça montre que le gouvernement français est en faveur du massacre des Palestiniens.»
Elle a aussi applaudi les appels internationaux à la grève pour stopper l’envoi d’armes à Israël: «La France a pris le parti des Israéliens parce que ça profite plus que d’aider le peuple palestinien. Il faut qu’il y ait des manifestations partout. Il faut arrêter les armes pour faire arrêter le massacre.»
Azura, qui travaille dans le secteur médical, a dit: «On est à l’ère du numérique en 2023, et on se rend compte qu’on peut assister, en 2023, littéralement, à un génocide, un crime de guerre contre une population désarmée, affamée, assoiffée, assiégée, qui subit des bombardements nuit et jour. C’est fou, on peut assister à ça depuis notre canapé. On a juste à éteindre Netflix … il y a des exactions contre des femmes, des enfants, des familles entières. On arrive à un stade où on se demande où est l’humanité.»
Soulignant son effroi alors que les médecins palestiniens n’ont même pas de Doliprane à donner à leurs patients, elle a dit sa colère contre le gouvernement français: «Il y aura des conséquences, l’Histoire se souviendra de ce qui s’est passé. Il y aura des condamnations.»
Jean-Guy Greilsamer, membre de l’Union juive française pour la paix, a dénoncé l’action «effroyable» du gouvernement israélien qui a «la volonté de faire disparaître un peuple de son territoire.»
Il a poursuivi, «La situation est extrêmement grave pour trois raisons, d’abord la survie du peuple palestinien. Ensuite par rapport aux populations juives, le régime israélien donne une image des populations juives, comme si tous les Juifs soutenaient les colons et ce régime dont les ministres ont carrément affiché leurs intentions génocidaires. Ça donne une image des Juifs qui, forcément, favorise l’antisémitisme. La troisième raison, c’est la situation internationale … le pire n’est pas exclu, la guerre s’internationalise.»
Il a aussi attaqué les menaces du gouvernement, qui a fait arrêter un membre de l’UJFP à Strasbourg: «Le gouvernement veut s’en prendre aux antisionistes. Nous sommes une association juive antisioniste. Les soutiens d’Israël nous disent parfois, quand on distribue des tracts dans la rue, ‘C’est vous les pires. Vous êtes des traîtres, vous avez la haine de vous-même’.»
Il a souligné l’enthousiasme que provoque le mouvement mondial contre le génocide à Gaza: «Ce qui nous intéresse beaucoup c’est qu’aux Etats-Unis, il y a un pôle tout à fait non-négligeable de la population juive états-unienne qui se révolte, qui a même envahi le Congrès et la gare centrale à New York. Dans cette population juive, beaucoup de jeunes refusent le régime israélien».
Greilsamer a applaudi les appels à bloquer le ravitaillement d’Israël: «Il faudrait que les syndicats français fassent de même. Il faudrait que ça progresse, jusqu’à bloquer des livraisons d’armes. Les luttes ouvrières et le peuple palestinien ont tous les deux affaire à des régimes impérialistes, colonialistes, de domination, de ségrégation, qui opposent les populations les unes contre les autres. D’un côté il y a les autorités dominantes qui pratiquent des politiques de ségrégation à l’égard des travailleurs, des colonisés, et face à eux, une résistance se développe».